Chez nous, à Madagascar, malgré un hiver assez rude, les gens n’en oublient pas pour autant de cultiver leur joie de vivre. C’est entre le mois de juillet à octobre que l’on se sent s’éveiller les esprits des fêtes.
Bref, l’hiver à Madagascar est traditionnellement festif. Famadihana (exhumation des morts), Fisemana (une cérémonie de purification spécifique à l’ethnie antakarana)… mais la tradition hivernale la plus spectaculaire reste sans doute le « Didim-poitra » ou circoncision.
La circoncision à Madagascar, plus qu’une coutume
La circoncision est une ablation rituelle du prépuce pratiquée par la totalité des Malagasy (excepté certains clans antandroy). Cette cérémonie possède plusieurs appellations selon les ethnies . « Didim-poitra », « Famorana »,« Fahasoavan-jaza » dans la région Imerina, « Savatse » dans la région du Sud-Ouest et « Sambatra » dans la région du Sud-Est.
Certes, les rituels varient en fonction des régions, mais les démarches sont souvent les mêmes. Chez les Antambahoaka, par exemple, le « Sambatra » se déroule tous les 7 ans en octobre tandis qu’il se pratique annuellement dans les autres régions de Madagascar.
Racines et naissance de la circoncision à Madagascar
Les récits anciens mentionnent le roi Andriamanelo comme étant l’instigateur de ce rite antique. Rappelons d’ailleurs que ce roi civilisateur du XVIe siècle est à l’origine de nombreuses innovations importantes comme la forge du fer ou encore la consommation de la viande de zébu.
Plus tard, cette coutume fut promue fête nationale par Andrianampoinimerina. C’est durant le règne de ce dernier que la pratique du « Didim-poitra » connaitra ses dernières améliorations et son apogée. Ainsi, le roi instaura une circoncision septennale (tous les 7 ans) obligatoire dans son royaume.
Mais pourquoi tous les 7 ans ? Parce que l’année du vendredi ne revient que tous les 7 ans. Or, la circoncision à Madagascar doit se dérouler à une année qui commence par un vendredi, qui est un jour saint pour les Malagasy. Jusqu’à aujourd’hui, ce rite est encore tenu en grand honneur chez les Antambahoaka de Mananjary.
Seulement, cette célébration septennale a connu ses derniers jours en 1869 dans la région d’Imerina, sous le règne de Ranavalona II qui venait d’abandonner la religion traditionnelle malagasy au profit du Christianisme. Depuis, cette cérémonie n’est plus devenue publique et se pratique en privé.
La symbolique de la circoncision à Madagascar
Bien que la circoncision à Madagascar s’apparente, à première vue, à de simples réjouissances, ce rite ancestral revêt en réalité une profonde signification. La symbolique qui ressort de cette pratique est qu’en abandonnant son prépuce, le petit garçon acquiert son statut d’homme. D’ailleurs, un homme non circoncis n’aura aucune chance avec une femme et ne pourra pas être enterré dans le tombeau familial (fasan-drazana).
Comment se déroule une circoncision à Madagascar ?
Pour que la destinée (tonom-bitana) du petit garçon soit forte et favorable, sa circoncision doit se faire en période de lune montante. La pleine lune étant déconseillée, car elle favoriserait l’hémorragie.
Généralement, une circoncision à Madagascar a lieu dans la maison du garçon à circoncire. L’opération se fera à l’aube (idéalement avant 5 heures du matin), mais la veille, au crépuscule (somambisamby), un jeune homme dont le père et la mère sont encore en vie (velon-dray aman-dreny, zaza tsy kamboty), sera chargé de récupérer l’eau sacrée ou « rano mahery » au pied d’une montagne. Cette eau sera utilisée pour nettoyer les mains du guérisseur traditionnel ou « rain-jaza », le couteau (ou une tranche de bambou) et la plaie laissée par l’opération. Des tiges de canne à sucre (pour souhaiter une vie « sucrée » ou une vie heureuse) et des bananes (pour avoir des descendances mâles) sont également placées dans la maison. La famille festoiera durant toute la soirée où festins, chants, et « toaka gasy » seront servis à profusion. Les hommes qui prendront part au rituel devront observer 8 jours de jeûne précédant la circoncision. Ils devront aussi accomplir différents travaux et toutes les tâches ménagères sous peine de rendre le petit garçon lâche.
Le jour J, seuls les hommes (grand-père, père, oncles) sont autorisés à prendre part à la cérémonie. Le « rain-jaza » se chargera de couper le prépuce avec un couteau ou un bambou. Le sang qui se verse sur le sol symbolise l’unification du petit garçon avec la terre de ses ancêtres.
En fonction des tribus, ce sera le grand-père ou l’oncle maternel (zaman-jaza) qui avalera le prépuce, avec une banane en guise d’accompagnement. L’enfant est ensuite accueilli par une foule en liesse qui lui comble de cadeaux. La phrase « arahaba ririnina e ! » est prononcée pour féliciter et souhaiter du bonheur au garçon et aux parents.
Au terme de la célébration, la famille paie le « rain-jaza » avec de l’argent liquide, un coq ou un poulet.
La circoncision traditionnelle malagasy est une pratique toujours préservée à Madagascar. Néanmoins, certains parents optent aujourd’hui pour des méthodes plus modernes. A l’instar de la circoncision américaine ou la cautérisation pour des raisons d’hygiène. Le coût de telles opérations reste néanmoins élevé pour une revenue moyenne malagasy.
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